Historique (Mercurial) (1)

Avec une vocation militaire et guerrière qui se mua en une activité ludique, la Société Royale des Archers Saint-Sébastien est la plus vieille société de la commune de Bernissart.  Royale, elle le deviendra le 9 octobre 1987 après 200 ans d'activité.

Contrairement aux sociétés qui existaient aussi à Blaton et Harchies et qui ont disparu (peut-être à cause de l'Edit de Joseph II du 18 avril 1786 ou du décret de la convention française appliqué en Belgique en 1796), notre confrérie traversa les siècles, connaissant diverses fortunes...

Période militaire (du XIIème S. à 1716)

Créée au XIIème siècle, la société des Archers était en fait une milice locale, une garde féodale.  Ses membres devaient notamment s'exercer au maniement de l'épée, de la dague ou de la hallebarde.  Ils étaient tenus d'avoir "accoustrement de la mesme parure et couleure que se pourra prendre et choisye par icelle".  De plus "endedans les quarante jours enssuyvant leur entrée, avoir arcq à main bon et suffisant, avecq furniment et aultres choses requises pour la commodité d'iceulx" (2).

Les vassaux chargés de la protection de notre château local étaient donc astreints à une prestation militaire bien qu'au départ le but suivi est de "s'exercer et prendre récréation honeste, les dimences et festes après le sainct service divin et non s'adonner à buveries, ivrogneries, jeuz indeuz, oisiveté et aultres dissolutions dont on ne povoit ensuivir aulcun bien" et "d'aultant que ce faict et exercice leur pourre à l'advenir causer plus grande fruition et gharantie du chateau et villaige, se présentant quelque occasion ou invahie d'ennemis, selon que cy-devant s'estoit monstré par expérience et effect"(3).

Notre valeureux Seigneur de Bernissart, Baudoin d'Auberchicourt (1267-1302), répondant à l'appel du roi de France Philippe le Bel, conduisit nos archers à la bataille des Eperons d'Or à Courtrai le 11 juillet 1302.  C'est sur ce champs de bataille qu'il périt avec nombre de ceux-ci.

Malgré la découverte de la poudre à canon qui révolutionna l'art militaire, une nouvelle compagnie d'archers vit le jour mais en 1478, Louis XI assiégea notre château qui fut détruit.  La milice fut alors dissoute pour renaître à nouveau au XVIème siècle.  Elle exerça son rôle de milice jusqu'en 1716, année lors de laquelle Marie-Marguerite Louise de Milledonck, dame de Bernissart, épousa Alexandre Emmanuel de Croÿ.  Le couple n'habitant plus notre château, la compagnie fut une nouvelle fois dissoute.

La période de loisir (de 1766 à aujourd'hui)

Le 21 juin 1766 naquit une nouvelle société d'archers toute différente de celles qui avaient vécu auparavant.  L'arc devint un instrument de plaisir, d'amusement et plus une arme.  Cette société sera abolie en 1786 par l'Edit de Joseph II qui voulut réglementer les festivités locales.  Elle renaîtra en 1789 avec la révolution française.

Cette confrérie prend le nom de "Confrérie des archers Saint-Sébastien".  Ses responsables, au nombre de 19 à l'époque, rédigent un règlement et proclament leurs statuts.  C'est le "Serment des Archers".  Il restera en application jusqu'en 1860.  Parmi les 19 membres fondateurs, on peut citer les noms de vieille familles bernissartoises telles que Vigneron, Lesplingard, Tondeur, Battard, Dewez, Briemant, Milisse, Delwarde, Criquelion, Fougnies, etc...

Ce règlement était divisé en trois chapitres traitant en 53 articles des confrères jouant, du jeu et des assemblées.  La bienséance et la justice étaient les principales qualités de celui-ci.  Assez sévère et plus adapté à l'époque il sera revu en 1886, en 1903 et en 1979.

Le nombre de sociétaires fut longtemps d'une douzaine (contrairement à la confrérie d'Harchies qui comptait 36 membres).  Il monta à 30 en 1820 pour retomber à 7 en 1847.  Il était de 25 en 1921 et de 32 en 1991 lors de la commémoration de 225ème anniversaire de la confrérie.  Les premiers sociétaires devaient acquérir leur titre d'archer en payant un droit d'entrée.  S'ils voulaient quitter la confrérie, ils étaient astreints à un droit de sortie relativement élevé.  De même, chaque transgression au règlement était punie d'une amende proportionnelle à la gravité des faits.

La confrérie était administrée par un capitaire, un roi, un lieutenant et un connétables chargé de la perception des cotisations, des amendes et du paiement des frais.  Certains grades s'achetaient d'abord en argent sonnant et ensuite en "canette de bière".  Le titre le plus envié était celui de roi.  Pour y arriver, il fallait et il faut toujours abattre l'oiseau royal.  Celui qui gagnait le titre durant trois années consécutives était nommé empereur, honneur suprême qui ne fut décerné qu'en 1781 (Jean-Baptiste Briemant, roi en 1779, 1780 et 1781) et le 19 octobre 1830 (Jacques-Joseph Gossez, roi en 1828, 1829 et 1830).  La famille de ce dernier reçut d'ailleurs les archers le 19 octobre 1930 afin de fêter le centième anniversaire de son élevation à la dignité d'empereur.
Les grades sont maintenant tombés en désuétude, mis à part celui de roi ou d'empereur.

En 1820 la société fut pourvue d'un drapeau portant en fine broderie d'or ce millésime avec un écusson encadrant Saint-Sébastien.  Ce drapeau fut remplacé par un nouvel emblème, don de la commune, le 16 septembre 1986 lors de la commémoration du 220ème anniversaire de la société.  Le vieux drapeau repose dans une vitrine de l'Administration Communale de Bernissart tout comme une médaille de roi de la société.

Il y avait et il y a toujours deux grandes fêtes qui sont le tir du roi ou "tirage à l'oiseau" qui a lieu en avril et la fête de Saint-Sébastien qui se déroule le 20 janvier.  A l'origine, un plantureux banquet clôturait la fête.  Actuellement ce banquet a lieu le samedi le plus proche de la festivité.  Le roi reçoit également chez lui tous les sociétaires le premier samedi de janvier et ce, afin de leur offrir le verre de l'amité.

 

1953 - Devant le "Salon Brassart"
1. Alfred Vandekerkove
2. François Warquesse
3. Willy Polloni
4. Marcel Museur
5. Augustine Saudemont
6. Cyrille Vandenbossche
7. Robert Delbart
8. Ernest Druart
9. Alphose Brassart
10. Emile Debeaumont
11. Marceau Marin
12. Robert Delfane
13. Auguste Briemant
14. Juvenal Couvreur
15. Louis Commans
16. Félix Ponchaux
17. Alfred Courtin
18. Lucien Decrouez
19. Gaston Duquesne
20. Non identifié

 

Le tir se pratiquait et se pratique toujours au berceau, c'est-à-dire à l'horizontale.  Obtient le titre de roi celui qui arrive à décrocher de son support l'oiseau royal.  Il s'agit en fait d'un petit cylindre de bois ou de plastique qui est percé en son centre et qui est surmonté d'une plume.  Ce cylindre est enfoncé sur un pic métallique qui le maintient à l'horizontale ou presque.
Le roi recevait en cadeau un plat en étain gravé.  Les autres confrères ayant abattu des prix recevaient quant à eux des assiettes faites dans le même métal.

A l'origine, les tirs avaient lieu "aux berceaux", un vaste jardin situé derrière la cure actuelle et qui avait été offert à la société par le Seigneur Jacques de Failly en 1763.  Il restera la propriété de la confrérie jusqu'au 6 juin 1842, date à laquelle il sera remis à la fabrique d'église.

Depuis la disparition du berceau, le tir se pratique dans un établissement de l'entité.  La société a connu divers locaux dont notamment le salon Brassart à la rue Lotard, le café Ulysse sur la place, le café Mercator aussi sur la place et exploité par Paolo Marchi (en 1967) et au café "Chez Zorro".  Depuis peu, la société est installée au café "La Taverne du Calvaire" à la rue Grande.

 

18 mars 1967 - Jean-Marie Vivier, nouveau Roi
1. Alphonse Brassart
2. Francis Warquesse
3. Léon Daragas
4. Léo Marchand
5. François Warquesse
6. Jean-Marie Vivier
7. Emile Boucq
8. Jean Brisson
9. Gaston Duquesne
10. Paolo Marchi
11. Béatrice Ubiali
12. Willy Polloni
13. Chabon Laroug
14. Fernand Gosselin

 

Société autrefois exclusivement masculine, elle s'est ouverte aux dames en 1990.

Restée bien vivante dans notre entité, cette société nous rappelle une vieille tradition qu'il est sage de préserver.  Les valeurs morales héritées de celle-ci sont un exemple que bon nombre d'individus ou de groupement devraient pourvoir appliquer.

(1

Ce texte est tiré de l'édition Mercuriale n° 1 septembre 1998 rédigé par Didier Boulogne. Avec l'aimable autorisation de Monsieur Jean-Paul Caulier éditeur responsable & Monsieur Didier Boulogne.

(2

Extrait du règlement relatif aux "Poinctz et Articles accordés à la confrairie d'Archiers de l'Arcq à main de la Baronnye d'Archies".

(3

Extrait du règlement qui fut donné en 1608 par le duc de Croÿ et d'Aerschot, Grand bailli du Hainaut.  Celui-ci a heureusement été conservé et repose aux Archives de l'Etat à Mons. (Métiers et Serments, N°I.283).

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